Emmanuel-Joseph Sieyès - Concepts clés

Explication: Sieyès formule la thèse nodale de son pamphlet de 1789 par le triptyque devenu canonique: le tiers est tout, n’a été rien et demande à être quelque chose. Ce slogan condense son attaque contre l’Ancien Régime des ordres et sa revendication d’une représentation nationale fondée sur l’utilité sociale et l’égalité civile.

Explication: Sieyès popularise la distinction fondatrice entre pouvoir constituant (source originaire de l'ordre juridique, la nation) et pouvoirs constitués (institutions déléguées par la constitution). Cette articulation légitime la primauté du texte constitutionnel et l’incompétence des organes ordinaires pour le modifier.

Explication: La souveraineté est nationale, non monarchique ni strictement populaire au sens rousseauiste. La nation, être collectif antérieur à l'ordre juridique, peut déléguer sa volonté par représentation. Cela justifie la représentation politique et l'exclusion du mandat impératif.

Explication: Faux. Les députés représentent la nation entière et non leur bailliage. Sieyès rejette le mandat impératif, car il contredirait l'unité et l'indépendance de la volonté nationale dans un grand État.

Explication: Sieyès associe le Tiers aux activités productives et aux services utiles (agriculture, industrie, commerce, professions libérales). Cette définition fonctionnaliste oppose les producteurs à des ordres oisifs jouissant de privilèges.

Explication: Sieyès imagine un jury constitutionnaire, organe spécialisé pour protéger la constitution contre les empiètements des pouvoirs constitués. Cette intuition annonce le contrôle juridictionnel moderne de constitutionnalité.

Explication: Vrai. La nation, pour Sieyès, est antérieure à l'ordre juridique et en est la source. Elle confère mandat aux pouvoirs constitués par l'acte constituant.

Explication: Le 17 juin 1789, Sieyès est l'inspirateur de la motion par laquelle le Tiers se déclare Assemblée nationale, acte fondateur de la souveraineté représentative et rupture avec le vote par ordre.

Explication: Sieyès, hostile à un veto absolu, admet un veto suspensif qui laisse ultimement prévaloir la volonté législative nationale. La Constitution de 1791 retiendra un veto suspensif du roi.

Explication: Faux. Sieyès défend la représentation comme mode nécessaire d'expression de la volonté nationale dans un grand État, à rebours de la démocratie directe prônée par Rousseau.

Explication: Sieyès est partisan d’une assemblée nationale unique, expression indivisible de la nation, sans restauration d’un contre-pouvoir nobiliaire.

Explication: Sieyès défend que seuls les citoyens dits actifs, contribuant par l'impôt direct (mesuré à l'époque par un seuil équivalent à plusieurs journées de travail), participent à l'élection, les passifs conservant les droits civils.

Explication: Faux. Il réclame le vote par tête et la fin de la représentation par ordres, jugeant que le doublement du Tiers est insuffisant sans l'abolition du vote par ordre.

Explication: Dans Essai sur les privilèges (1788) et Qu'est-ce que le Tiers-État, Sieyès dénonce les privilèges comme anti-nationaux et incompatibles avec l'égalité devant la loi, car ils morcellent le corps politique.

Explication: Le droit constitutionnel est normativement supérieur. Les organes institués ne peuvent modifier la constitution qui les crée; seul le pouvoir constituant peut le faire, par une procédure distincte.

Explication: Faux. Le représentant est mandataire de la nation entière. Toute fragmentation de la représentation en intérêts locaux trahirait l'unité de la volonté nationale.

Explication: Sieyès souhaitait un Grand Électeur, chef de l'État neutre et non-gouvernant. Bonaparte rejette cette pièce maîtresse et se fait instaurer Premier Consul, concentrant l'exécutif.

Explication: Les listes de notabilité de Sieyès organisent une sélection graduée des candidats jugés aptes par leurs pairs à différents niveaux, pour alimenter les nominations aux fonctions publiques.

Explication: Vrai. Bien que déformé par le bonapartisme, le Sénat conservateur exerce une fonction de protection de la constitution via les sénatus-consultes, écho affaibli du jury constitutionnaire imaginé par Sieyès.

Explication: La définition célèbre de la nation par Sieyès insiste sur l'unité juridique de la loi commune et la représentation unique, incompatible avec la survivance des ordres et privilèges.

Explication: La cohérence de sa théorie de la souveraineté nationale et de la représentation le porte à préférer l'œuvre constituante de représentants à des plébiscites qui court-circuitent la médiation représentative.

Explication: Vrai. Il s'oppose aux corps intermédiaires privilégiés qui fragmentent la nation, position cohérente avec la Le Chapelier et l'égal accès aux professions.

Explication: Rousseau affirme que la volonté générale ne se représente pas; Sieyès soutient au contraire la représentation de la souveraineté nationale comme seule praticable dans un grand État moderne.

Explication: Faux. Il rejette le mandat impératif et lier les représentants aux cahiers serait contraire à l'expression libre de la volonté nationale.

Explication: Il stigmatise la noblesse comme un ordre parasitaire, séparé du corps de la nation, car elle vit de privilèges sans rendre des services utiles à la collectivité.

Explication: Vrai. Il mobilise l'idée de pouvoir constituant pour refonder l'ordre politique en 1799, même si Bonaparte altère son projet institutionnel initial.

Explication: Sieyès promeut l'égalité civile et l'ouverture des charges à tous les talents, rompant avec l'accès réservé par ordre et privilèges héréditaires.

Explication: La légitimité politique vient de l'utilité rendue à la nation par les activités productives et de service. Ce critère disqualifie la représentation privilégiée des ordres oisifs.

Explication: Faux. L'amendement constitutionnel exige une procédure distincte relevant du pouvoir constituant dérivé; les pouvoirs constitués sont incompétents pour se refonder eux-mêmes.

Explication: Son schéma associe la sélection graduée des élites par listes, un gardien de la constitution (idéalement un jury constitutionnaire), et une séparation entre chef d'État neutre (Grand Électeur) et exécutif effectif; Bonaparte n'en retient qu'une partie.